12 février 2013


 Passage à l'acte / Paul de Brancion

                  
IL Y A UN TROU DANS LE RÉEL QUE RIEN NE PEUT 
COMBLER
C. Du Lac

Lorsqu’elle le dit
        refus
retourné
vaudrait mieux ne pas parler utiliser d’autres moyens
        que
langage qui momifie l’angoisse
propulse une sorte d’autre réel
affaibli de tous les oripeaux de l’impossible vie
ressassant l’amour fait au silence
les émois improbables
suspendus
espérés
éperdument
après juste il y a le meurtre
ne pas parler surtout
sinon
les gestes déviés par la prison d’amour
qui s’impose retenue tant et tant
        ciels
      immensités d’orages lourds raturés avec paroles
    craintes
des milliards de mots
   ne se disent plus
de ne pouvoir se dire
s’étant à peine jamais dits
alors autre chose dans la peur du naufrage
jusqu’au geste de violence
sur fond de ces amours imprononçables
sans cesse
avec boulimie
jusqu’à étourdissement
permanence de l’ombre qui couvre
et recouvre
avec l’acting out salace véhément et venimeux
qui hache obère puis détruit la liberté de nourrir la vie
faut avoir l’âme trempée dans l’acier
pour passer à l’acte
hors le verbe toujours
et
rester sur la tranche du fil vibrant
malgré l’explicite affolement
des mots indistincts
ou plutôt des états d’effervescence
inexprimables
hormis
dans les avatars multiples d’une hérésie
trouée
cet abîme qui sépare les mots
de la langue alanguie en sa beauté
acérée ou follement attentive
ce trou noir où chuchotent des ritournelles
    toutes faites
  fictions narratives
d’histoires construites
  (secrets de famille parfois)
pour masquer assourdir étouffer
cela qui manque
ne se dit pas
car imparlable
pas de carabistouilles sur le pourquoi de
ça
ne couvrons pas de mots de raison
ce qui ne fut que trop
  apprêté de mots inutiles d’ailleurs
folie qui ne cherchait qu’à prendre la place
usurper ça
ça : ruomA

amo
amas
amat
amamus
amatis
amant
oui amante

« Je te demande de ne pas accepter ce que je te donne parce que ça n’est pas ça »
Jacques Lacan dixit

4 février 2013

Par la petite porte 1


par la petite porte 1



            je m'appelle j'acques, Estager mais j'acques...

            longtemps j'ai vécu une dépression sans pouvoir ni comprendre quoi désormais écrire (sauf 'une ligne et demi chez Aude, ma fille, et que je lui ai dédiée)
            lorsque j'ai décidé d'aller mieux, je n'ai pas  tout de suite écrit, puis « par la petite porte » je suis entré et ai parcouru mille et...  quelques pages, dont il ne reste rien que dans leur disparition ma naissance seconde, ma ressuscitée, et avec la première venue à moi de Saul)

            au bord des mille pages j'ai trouvé et entrouvert une petite porte entrouverte déjà, toujours ;  c'est dans l'émotion, comme on dirait à la fois dans l'inconscient tout de suite le conscient, leur pur même geste : que je trouvai que le monde était ce verger détruit, dont j'écrivais autrefois :

« de verger plus ;
le vent »),

            j'ai trouvé qu'il était « le monde », toute ma rondeur du monde mon lieu enfantin ; je regardais ce verger, je regardais aussi son lieu sans lui (disparu mais compris de moi me retournant sur lui)

            et j'aimais aussi, désormais (tout n'est-il pas désormais, et y a-t-il le passé, sinon présent, à lui-même déjà), ce lieu autre (du verger remplacé par une étable et grange...) mais qui par une bande de terre nue et depuis souvent cheminée descendait dans la même campagne (comme « de mes parents »), qui entourait toujours le verger (vu de moi, dans ce « monde »)

            sur le verger et monde il n'y a je ne saurais quel vent, mais cet or, ce vert, cet enfantin lieu premier (non seulement enfantin), et ce fut pour moi et nommée par moi « la terre »
« le monde » était le monde disparu c'est-à-dire le monde de disparu en autre monde, celui qu'on est au dehors du temps (non de dans le temps) ;  nous pouvons disparaît un moment, le monde et moi, puisqu'il y a autour, et le temps lui aussi or autour, la terre et mienne (le même moment ni présent ni passé, le même geste d'aller et retourner) 

            le monde et la terre sont leurs et nôtres images, nous sommes restés appuyés à notre ciel ensemble et nous nous sommes rejoints, réunis dans le regard et ciel, d'où écrire (non seulement nous sommes retournés, mais entrés dans cette parole qui de moi à moi commençait, comprise, et le monde et la terre  dont la première phrase qui les révèle fut :
« et », le monde « « et » la terre)

            depuis lors toutes visions d'ici et là chez moi composèrent et comprirent mon entrée du monde (qui n'était plus le seul verger de disparu, de toujours là) sur la terre, d'images qui sont le monde, et des phrases...

            il y a le vent le plus léger qui soit et qui est la transparence de la parole et du vent :  je dis : le vent, et aussitôt et spirituellement et visuellement et amoureusement du lieu la parole est arrivée, est au vent, et il l'emporte ;  il n'y a pas d'image, nous sommes là :  j'y suis puis nous continuons, même disparus, avec moi.
            Il y a eu l'entrouvert de cette petite porte avant et après le ciel, et ce ne fut d'abord jamais que le monde et la terre,

                  j'

28 janvier 2013

Un cadastre d'enfance, Roland Nadaus





Un cadastre d'enfance
Roland Nadaus, Éditions Henry, 2012,  6 euros

Ça commence abruptement :
"Aujourd'hui :
Mon papa n'est pas mon père"…/
…….
Présentement
Je me tais. Mais j'écris.
Ce livre noir de l'enfance représente un effort pour faire face à une façon "merdique" de venir au monde. Oublier par l'écriture de la douleur à la lisière du volcan du passé et regarder dans les yeux, coûte que coûte, l'opacité incommensurable du fait d'arriver à la vie à côté de la plaque et à la fois en plein dans le mille.
Poésie, s'il en est, qui dit quelque chose dans l'envers désolant des bons usages conformes alors qu'on tombe sur la terre entre la peine, l'oubli et la torture.
"À l'âge d'Alzheimer
je me souviens de tout Môman
et que tu m'as tant aimé
que c'est ta vie que tu m'as donnée
Et du coup, je ne me souviens plus
de moi  - "
Florilège :
"Foutu paquet cadeau"
"C'étaient les sabots de la Mort,
le raclement de ma naissance
le souvenir de cette noyade
   ou de cette pendaison
dans le ventre de ma mère
 Fœtus, j'avais tout entendu"

Tout ceci est lourd d'une puissante humanité :
"j'ai plongé mon âme buissonnière dans les excréments du réel et le fumier des apparences"
"J'ai boxé l'ignoble
          présent
 avec mes petits doigts de gangster honnête"
"Je suis devenu vieux très jeune"
"Je ne sais pas compter jusqu'à
                      moi
– alors comment parler de mes enfances".

Je ne résiste pas à citer la recette de la soupe aux vers de terre :

La soupe aux vers de terre :
On prend des vers de terre, il vaut mieux qu'ils soient gros, grands, gras : pour les couper en morceaux et les écraser dans la dînette, c'est plus commode, mais on peut aussi faire une soupe de bonne qualité avec des bébés vers de terre ou des vers de terre nains, c'est seulement plus difficile à touiller.
On prend du sable ou à défaut de la terre très fine : si elle n'est pas assez fine, on la passe au tamis de la passoire à thé par exemple.
On prend de l'eau ou bien on crache : à plusieurs c'est mieux parce que ça fait comme une fondue.
Après on touille, on écrase, on remue dans un sens et puis dans l'autre, on fait chauffer sur des pierres qu'on a disposées en foyer, on fait des gestes avec les mains pour montrer que c'est très chaud, que ça brûle, on le crie !
À ce moment on goûte la soupe aux vers de terre en se passant la dînette – ou la boîte de conserve si on n'a pas de dînette : une petite cuillère est utile, mais on peut faire comme si avec une brindille ou un caillou ou encore un trombone à papier.
Les plus gourmands font : hum, j'en reprendrais bien, mais un peu, mais à la fin le sang coagule et mélangé au sable blond, ça fait sale, alors on fait semblant de vomir, c'est le meilleur moment.

Ce livre courageux, car il met à nu, est tout à fait atypique. On y sent que Roland Nadaus nous dévoile sans fard le fond de son affaire. On salue cette mise en boîte de l'enfance et son émotion contenue. C'est un livre fraternel, un morceau d'humanité, constat sans concession à la modernité.

P de B

10 novembre 2012

Appel aux poètes




Le CNL a failli supprimer sa commission poésie, ce fut évité de justesse grâce à la mobilisation de nombreux poètes ! L'Union des Écrivains, dont nous sommes, va bientôt se dissoudre. Des associations et organismes servant la poésie risquent de disparaitre. Tels sont, parmi d’autres, les déclencheurs qui nous incitent à agir.
Depuis une trentaine d’années des médiateurs et éditeurs, souvent poètes eux-mêmes, ont réalisé un véritable travail de promotion de la poésie, mais cela suffit-il ? Non. La poésie reste mise à l’écart, en raison de sa singularité.
Il nous semble nécessaire de tirer la sonnette d’alarme et de faire appel à tous les poètes pour qu’ils se rassemblent dans une UNION DES POèTES.
Paul de Brancion, Brigitte Gyr, Mathias Lair

La poésie est menacée, et de multiples façons :
Par son petit chiffre d’affaire : moins de 0,4% du CA des éditeurs adhérents au SNE ; par sa difficulté à trouver des circuits de distribution et diffusion solides et pérennes ; par sa difficulté à trouver des libraires investis dans sa promotion active auprès du public ; par sa quasi absence dans les medias de référence ; par la remise en cause régulière des soutiens institutionnels ; par une méconnaissance générale de sa forme vivante, aujourd’hui.
Pourtant la poésie est vivante :
L’activité éditoriale foisonne, réalisée le plus souvent par des personnes qui ne        peuvent en vivre ; les rencontres et manifestations poétiques sont multiples ; les poètes sont nombreux mais leur singularité essentielle les rend naturellement rétifs à toute organisation.

Une seule issue, s’aider soi-même :
Les poètes doivent unir leurs voix pour défendre la poésie

  Nous vous appelons à vous rassembler dans l’Union des Poètes pour :
§  Promouvoir et défendre la poésie vivante dans toutes ses composantes, sans exclusive.
§  Représenter et prendre la défense des poètes auprès des diverses instances concernées : pouvoirs publics, organisations diverses, médias…
§  Agir pour le soutien de la création poétique et pour le maintien d’une production éditoriale et d’une diffusion indépendantes.
§  Agir pour développer la lecture de la poésie

Nous invitons les poètes à une
Réunion
le 5 décembre de 17 à 19 heures au café Le Bullier
22, avenue de l'Observatoire, Paris 14, Métro Port Royal
  
Pour adhérer à l’Union des Poètes (association selon la loi de 1901) :
         Cotisation : 20 € à l’ordre de l’Union des Poètes/100 € pour les membres bienfaiteurs
         Adresse : 12, rue de l’Héronnière, 44000 NANTES
         Courriel : uniondespoetes@gmx.fr  téléphone : 0240584267