11 juin 2010

MIGRANTE EST MA DEMEURE , Nils-Aslak VALKEAPÄÄ, éditions Cénomane, 29 euros

Migrante est ma demeure est l’œuvre de Nils-Aslak Valkeapää, qui est, nous dit l’éditeur, « le chantre de la pan-laponie, le chef de file des poètes-sculpteurs et des chanteurs-musiciens sames ». Les Sames, comme je l’ai découvert à cette occasion, sont les gens nés en Laponie.

Ce livre est composé de trois recueils qui ont été publiés initialement avec des couvertures aux couleurs du drapeau lapon : jaune, bleu, rouge.

Le premier, intitulé « les nuits de printemps si claires » évoque dans des poèmes de quelques vers aux mots simples, le paysage, la nature au fil des saisons qui passent.

« Les nuits de printemps sont si claires

si claires

Le cœur solitaire bat la chamade

Ses pensées le brûlent. »

Steppes venteuses, nuit lumineuse de l’été et celle, interminable, de l’hiver, mouettes, cygnes, élans « et ce vieux chien sur le plancher qui s’étire et soupire de plaisir »…

Dans le deuxième recueil, « Chante gazouille Grelot-des-Neiges », Valkeapää fait surgir les Sames d’Antan, peuple nomade et courageux, ceux :

« qui tiraient parti du moindre rien

comme ils savaient déjà

façonner fourrures lacets et mocassins d’été

faire griller sauter sécher

l’appétit venait s’il venait

mais la faim n’avait pas droit de cité… ».

Sagesse et respect du monde qui leur donnait subsistance mais aussi confrontation avec la civilisation dominante du blanc dont le poète ne reconnaît ni la préséance ni le besoin.

Enfin, le troisième recueil, « Une source aux veinules d’argent » parle de différentes populations autochtones, ses frères, les Amérindiens, les Inuits, les hommes du Quart Monde. C’est un hymne à la différence au respect de l’autre, de ses traditions et de ses croyances.

Pourquoi parler de ce livre dans ROBERT LE DIABLE? Valkespää avec sa langue précise et naturelle, évoque et même invoque la nécessité pour une civilisation de concilier valeurs ancestrales et modernité au risque, si elle ne le fait pas, de disparaître. Ne pas se laisser hypnotiser par la technologie sans pour autant refuser le progrès. Cette question est de première importance pour nous aussi et la réponse qu’apporte le poète est une ode à la vie, à la fraternité, à l’amour.

Pourpre vespéral

Des cimes de bouleaux ondoient sur fond de ciel

Un rai de lumière filtre sur le chenal

L’indicible reste inexorable

Malgré tout


Catherine Tourné