19 mars 2010

OLIMPIA de Céline Minard, Ed. Denoël,10 Euros

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C'est un petit livre de colère, moderne ou plutôt contemporain par l'usage de gros mots dans un constant désordre grammatical fonctionnant par appositions en général calculées.

En termes équestres, on pourrait dire que la grande qualité de ce texte étrange, ou qui se présente comme étrange, est son "rassemblé". Il est court et tendu truffé de minardises céliniennes.

Florilège par sondage:
p 15: branlant, p 16: cul (2 fois), p 16 :diarrhée, p 21: Anna gnagna , p 24 : "le pouvoir ne corrompt que les faibles" (joli), p 27 : enculé , p 29 : homoncule, p 29 "rien de toi n'aurait été grand sans mon pouvoir, pas même ton nez", p 31 : cor-niaud, p 41: "je t'arrache un nombre de fois impressionnant", p 41 :"ça va cra-cher, ça va cracher place Madame, huit jours de long, ça va cracher des flam-mes!", p 44 : fils de pute p 45 : conseiller merdeux , p 45 : Porca Madonna, p 46: tête de chèvre pute, p 46 :"je ferai farcir sa vessie de truie avec le hachis de ses intestins", p 46 : "qu'elle torche les fions qui lui parlent", p 47 : "je prends, je garde, je conserve et je garde, et je ne rendrai pas", p 50 : "fils de grande pu-tain", p 52 : "pantinus cretinus », p 52 : « morveux",p 53 : "plus qu'un pet de cheval de Marc Aurèle",p 54 : « Débiles profonds ! Pauvres et mesquins des banquiers. Toute ta race, des encaisseurs, des caissiers, des parieurs de rien, des vents, des bouses." (c'est presque d'actualité), p 55 : "ta chaise à chier la sainteté, j'en fais des bûches", p 55 : "Je ne pardonne pas, rien, personne, rien à personne. Ce qu'on m'ôte, je le broie, je ne l'offre pas. Ce qu'on me prend, je le détruis, ce qu'on m'ordonne, je le nie"

Il s'agit, on l'aura compris – ou pas – de la vie d'Olimpia Maidalchini, qui naquit à Viterbe le 26 mai 1592, faiseuse du Pape Innocent son Innocent X, femme de pouvoir et de caractère.
« Je ne suis pas Romaine, je n'appartiens pas à la race des chiens canis canem, tu ne m'apaiseras pas avec un morceau de viande, je ne suis pas de Rome, je ne viens pas d'elle…"

Il y a des passages admirables vers la fin de la première partie sur une sorte de sac de Rome qu’Olimpia appelle de ses vœux :
"Par toutes les bouches que les Ponts Max qui m'ont précédée ont baptisées, je la noie, l'immense salope pourrie de mouches qui crut sécréter la civilisation je la noie, la triple maiale, l'abominable, la grandissime prostituée qui usurpa le trône de ses tyrans… »

S'ensuivent une dizaine de pages d'imprécations qui appellent à la destruction de Rome par mille submergements aqueux divers, et ces pages transcendent tout le livre, assez "tendance" par ailleurs.

Après ces moments d'irascible colère romaine, la Minard nous expose dans une seconde partie (qu’on suppose écrite en Bourgogne), la véritable histoire de la papesse. Et cette opposition entre un texte d'une violence recherchée et finale-ment une biographie historique, est reposante, apaisante.
De prime abord, pris dans la bourrasque verbale, on n'avait rien compris. Qui était cette énervée, cette effrayante personne que - hormis les visiteurs attentifs du palais Pamphili à Rome - peu de gens au fond connaissent ? Là, on saisit de quoi il s'agit et on met un visage sur … et un point final à l'idée romanesque qu'on pouvait se faire des papesses et antipapesses romaines.

Je ne sais pas très bien si cet ouvrage milite en la faveur de la parité politique en tout cas il pose la question des faiseuses de Roi.

P de B.