16 janvier 2012

Corinne Hoex Décidement je t'assassine, Ed Les impressions nouvelles, 13Euros


Cette nuit et ce matin j'ai lu cette implacable narration de la mort de la mère de C.H. d'une grande justesse.

Hôpital, cancer très près des menus plaisir de la fin d'une maman tyrannique, mais qui va mourir en inspirant encore l'air du monde qu'elle a ardemment consommé. Elle n'a pas épargné sa fille sans pour autant l'abandonner mais en la serrant par trop, sans trêve ni repos. "Il m'est arrivé de songer: dans trois ans, un an, un mois, un jour, une heure, tu seras ma chose, de même qu'enfant j'étais la tienne."

Mais cela n'arrive jamais les rôles ne s'inversent pas. Au bord du gouffre dans la douleur, on demande à sa fille si sa mère préfère une machine à respirer ou de la morphine pour l'aider à mourir.

"Maman, les doctoresses parlent de deux possibilités. La machine à respirer ou la piqure de morphine. Qu'est-ce que tu veux qu'on fasse?Tu n'hésites pas. Mais tu articules mal. Je ne saisis que la fin de la phrase:

- ine!

C'est la même syllabe dans machine ou morphineJe te demande de répéter. Tu lèves les yeux au ciel. Tu cries:

- ine!

Alors je te propose de ne plus prononcer que le début du mot.

-Maman, machine ou morphine, ma ou mor?Tes yeux excédés me perforent? quelle cruche je suis! Quelle gourde!-Dis moi s'il te plaît, Maman: ma ou mor?Ton regard me foudroie. Tu hurles:

- Mor! Mor!

La chirurgienne prépare la seringue."

La mère était championne de scrabble. Machine ou Morphine? Telle est la question du monde mais aussi quelques façons d'éviter la souffrance. Après il y a tout le travail de vider la maison, tout inspecter, jeter, souffrir

"décimer le passé".

Corrine Hoex écrit un récit serré, juste et triste jusqu'à la fin tenu d'une main de maître ( de maîtresse). Telle mère, telle fille donc se dit on. Du bel ouvrage mais on reste saisi.

P de B