21 juillet 2011

Mystique, Joë Bousquet Extraits

JE VEUX QUE MON LANGAGE DEVIENNE TOUT L’ÊTRE DE CE QUI, EN MOI, N’AVAIT DROIT QU’AU SILENCE

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A vingt ans, j’ai été détruit par un coup de feu. Mon corps était retranché de la vie ; par amour pour elle, je rêvai d’abord de le détruire. Cependant, les années, qui me rendaient mon infirmité plus présente, enterraient mon intention de me supprimer. J’avais été le blessé, je devenais déjà la blessure. J’ai vécu dans une chair qui était la honte de mes désirs.

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Il m’a parlé d’une leçon qu’il avait reçue d’un brin de lavande… Il écrivait, le matin, sans entendre monter de la cour les voix des enfants… Mais les paroles qu’on prononçait sur les balcons venaient jusqu’à lui. Ainsi entendit-il une femme dire que la lavande fleurissait, quand c’était aux nuits de s’allonger aux dépens du jour, et qu’on voyait bien que la couleur de ces fleurs était faite avec la jolie nuit du matin.