16 juin 2011

Cordwainer Smith, Les Seigneurs de l'Instrumentalité, 4 volumes, Gallimard, collection Folio SF.


Un chef d'oeuvre de science-fiction n'est plus de la science-fiction ; les livres de Cordwainer Smith ne sont pas seulement de la littérature. Personne du ciel, de l'espace et du temps et de la terre, n'approche ni ne s'éloigne (en moi) de Cordwainer Smith.

« Il était fou, fou de rage, au beau milieu des étoiles. » (p. 277, I)

« Une musique court au long de cette histoire. La douce musique du Gouvernement de la Terre et de l'Insturmentalité, sucrée comme le miel et comme lui, finalement, écoeurante. » (p. 556, I)

Les Seigneurs, qui n'interviennent guère dans les récits, sont les garants de l'organisation froide du monde (Cordwainer Smith aussi au-delà de la « fiction speculative »). La musique de Csmith est de l'âme nue, et des âmes, y compris bien-sûr les âmes du « sous-peuple » (corps humains, âmes « animales », comme de la merveilleuse femme-chat : C'mell).

« Il lui raconta qu'au milieu des étoiles les gens perdaient tout contrôle d'eux-mêmes, que leurs tendances refoulées se réveillaient et qu'alors leurs âmes apparaissaient plus noires que le fin fond de l'espace. L'espace, lui, ne commettait jamais de crimes : il tuait, tout simplement. La nature donnait la mort, mais l'homme, de planète en planète, amenait le crime avec lui. Sans son cube, l'être humain était contraint de jeter un regard dans l'abîme insondable de sa personnalité. » (p. 270, I)

« Un vaisseau à bord duquel, par chance, se trouvait un télépathe muni d'un projecteur lumineux qu'il avait braqué sur l'innocente poussière. » (p. 318, I)

« Et, cependant, quelque chose en eux les poussait à ajouter à chacun de leurs chants ce refrain qui les troublait eux-mêmes : Et je pleure sur l'humanité § » (p. 403, I)

« Nous vous donnerons tout ce que vous souhaitez sauf la souffrance d'un autre. » (p. 234, II)

Citations, peu, de la constante poésie de Csmith. Quant aux sous-êtres (n'est-ce pas?!) :

« Enfin, la cérémonie terminée, ils entrèrent dans la chambre du cheval. » « Le cheval leva la tête à leur entrée, mais voyant que c'était encore des humains et non des êtres de sa race, il la laissa retomber sur sa poitrine et attendit patiemment. » (p. 263, II) « Je ne connais aucun nom, émit le cheval, mais vous êtes du même pays que moi. Le pays, le beau pays. » « - Tu es un chien, émit le cheval. Un boooon chien ! » (p. 269 puis 270, II)

« Tout au fond de mon esprit le petit oiseau ou animal invisible continuait à pépier mentalement : hommebon hommebon rendslemort prendsdeleau prendsdeleau... » (p. 126, I)

Et les robots ? :

« « - Lisez dans mon esprit. Je suis un robot, mais aussi une femme. Vous ne pouvez désobéir aux humains. Je suis humaine. Je vous aime. Vous aussi vous êtes une personne. Vous pensez. Nous nous aimons l'un l'autre. Essayez d'attaquer. - Je... je ne peux pas, dit le sergent-robot avec quelque chose comme de l'ardeur dans ses yeux laiteux. Vous m'aimez ? Vous voulez dire que je suis vivant ? Que j'existe ? - Avec l'amour, vous existez », répondit Dame Panc Ashash. » (p.519, I)

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