8 mars 2011

TIQUE de Joël-Claude MEFFRE aux Éditions Propos/2 9 €


Nous sortons du monde des apparences fallacieuses. Ce petit recueil de Joël-Claude Meffre est sans conteste un ouvrage plein de poésie attachée au terroir, où l'austérité de ces pays du Sud - que l'on croit trop souvent accessibles à la facilité, alors que la mort sèche et la nuit, y règnent - est omniprésente.

De courtes séquences : le serpent, le cheval, le pré, la mort du grand-père, le chemin, les piquets, les sardines, ont des intitulés d'une grande simplicité.

On meurt de peu de chose et même la mort n'est presque rien. Rien n'est, hormis le regard et le chemin. L'âme donc, devinée, à peine devinée parmi les pierres qui s'écroulent vers le bas des choses. Tous les morts ensemble ne sont rien qu'une seule et même mort, avec le même visage informe.

On chemine avec le narrateur sans y penser, vers des "vallons institués", habités de parents, ceux qui ne sont plus ici-bas mais demeurent dans le souvenir des lieux.

"Il n'y a pas que des chemins, il n'y a qu'à cheminer".

Le livre s’achève par un texte absolument prodigieux :

Sardines

"T'es là, dans ta cuisine, avec la table encombrée

de journaux ; tu es assis sur ta chaise, tu mastiques trois

sardines qui étaient juste avant encore serrées dans

leur boîte et qui semblaient tellement bien nager

dans leur huile".

Francis Ponge est battu.

Sardonique Joël-Claude Meffre ajoute :

" Les sardines c'est d'ailleurs pas des poissons quand c'est comme ça

serré dans une boîte".

Nous assistons à la dénonciation dérisoire, huileuse, de nos efforts de modernité stressés, surveillés, entassés. C'est nous les sardines ! À bon entendeur, salut.

On aurait pu penser que le recueil aurait pu avoir pour titre « Chemin seul », qui m'aurait semblé illustrer parfaitement la posture originale (on pourrait parler d’im-posture/ de non posture justement, originale tant elle est sincère et tout à la fois distanciée) prise par l'auteur.

Il va à sa façon et parcourt le monde de sa montagne et de ses champs, sous son regard poétique, digne, un peu triste et austère, effleurant dans l'ennui du néant pour revenir à la présence.

Vers quelle solitude ?

"On ne va pas vers la solitude, ce n'est pas un but, si ce n'est que tu es seul à marcher vers l'espoir".

Ce poète est vivant, attentif, attachant.

Paul de BRANCION